jeudi 5 avril 2012

Avant la bataille

Je me suis approché de Gerhard. Je lui ai dit :
- Gerhard, tu ne feras pas l'assaut avec nous dimanche.
Il a levé ses yeux de loup vers moi dans une expression d'immense détresse :
- Je sais, Chef, je sais...
Le Barde était à côté en train de nettoyer son arme, mécaniquement. Il baissait la tête et regardait fixement devant lui. Il finit par murmurer :
- T'inquiète pas, Gerhard, on va te la gagner cette bataille, et tu seras à Bordeaux avec nous pour le Grand Combat.
Je m'éloignais et je passais devant Nathan. Il aiguisait consciencieusement un long coutelas avec un air gourmand. Le compliment que le vice fait à la guerre...
Morgan, David et Brock examinaient des cartes d'état major, cherchant la meilleure tactique pour déborder. Je suivis quelques instants leurs délibérations, puis je regardais mon petit caporal d'un air interrogateur :
- Ça ira, Chef, ça ira... Quand tout cela sera terminé, on ira boire une bonne bière dans un pub de Londres.
Je poursuivis silencieusement ma tournée. Chacun était dans sa bulle, concentré, mais je ressentais la force collective. Nous avions tant combattu ensemble que nous n'avions plus besoin de mots pour nous comprendre.
Le Capitaine des Gardes faisait lui aussi le tour des popotes. Il était souriant et plaisantait avec les hommes. Elvis l'accompagnait et chambrait gentiment. Ils avaient certainement aussi peur que les autres mais ne le montraient pas. Les plus jeunes, Jean-Marcellin et Noa affichaient toutefois une assurance roborative : placés en réserve, ils abordaient l'épreuve avec insouciance et optimisme.
Je terminais mon tour au bureau des opérations d'influence. J'espérais que leur idée de brouiller le contre espionnage en lançant des informations tous azimuts et sans cohérence nous aiderait à gagner la guerre de l'intox et à dissimuler nos plans jusqu'au dernier instant.
Je retournais dans mes casernements. J'avais ordonné, j'avais défini la tactique générale, j'avais fait mon travail. J'aimais ces petits moments de calme avant la tempête. Chacun, en fourbissant ses armes, savait ce qu'il avait à faire. Tout était désormais entre leurs mains et j'allais assister, spectateur, à l'engagement.
J'essayais d'imaginer l'état d'esprit de mon adversaire au même moment. Je tentais de me le représenter, songeur, élaborant ses plans dans le secret de sa conscience. Etait-il confiant, pensait-il avoir échafaudé une stratégie que je ne serais pas en mesure de contrer, ses hommes étaient-ils mieux entraînés que les miens ? Je me rassurais en me disant qu'il était désormais trop tard pour se poser ce genre de questions. Le sort était jeté.
La sirène de l'alerte retentit. Branle-bas de combat. C'était l'heure.

1 commentaire:

  1. Magique! Bravo Vern.
    Le D-Day s'approche à grand pas, et les Français parlent aux Français.

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